La nuit, tout les chats sont gris... [libre]

Ses pas l'avaient menée ici, sur la montagne maudite, alors qu'elle était dans un de ses nombreuses périodes d'errance consécutive à son autre travail. Les mains couvertes de sang, un sourire étrangement froid, peut-être un peu sadique sur les lèvres, Neige parcourait les chemin caillouteux, inégaux et plongés dans le noir de la montagne. La seule source de lumière était la lune. Elle brillait si fort dans le ciel.
Neige s'arrêta un instant pour la regarder, rendant ses yeux bleus, étrangement irréèls... beaucoup trop clairs. Le gout métallique du sang lui vint en bouche avant de disparaître aussitôt. Elle finit par détourner son regard, laissant échapper une note de tristesse à cause de ses souvenirs, toujours si présent quand l'astre de la nuit éclairait le ciel de toute sa puissance.
Neige resta immobile, à écouter le silence... non, il y avait quelque chose qui évoquait une présence humaine. Quelqu'un était là. La Narkombre se contenta de sourire, sans faire le moindre mouvement, attendant patiemment que la personne se montre ou ne s'enfuie.

Dans le ciel fuit la lune d'or, les nuages noirs couvrent les étoiles qui se cachent. La nuit n'a pas de feu.

[ Ovide, Les Métamorphoses ]

Elisabeth, assise élégemment sur l'un des nombreux rochers, contemplait, dans un silence religieux, la lune, cet astre tardif, sombre et élégant... à l'image de sa si belle et vénérée Déesse. La lune. Si belle, qu'elle en est probablement le rêve du soleil. La jeune demoiselle, qui n'en était pas vraiment une, profita de cet instant précieux avec délice. Elle aimait tant la nuit... La nuit, on voit des choses inexistantes, et, au comble de l'émerveillement, on y croit. Au grand jour, l'imagination pâlit.

Une présence la tira de ses réflexions. Il y avait quelqu'un. Se levant en un bond léger, Elisabeth chercha du regard qui a bien pu troubler cet instant au clair de lune qu'elle croyait privilégié. Un peu plus bas, en dessous d'elle, se trouvait quelqu'un, qui contemplait comme elle la lune. Ce fut la première chose que le Judicateur remarqua. La deuxième fut que cette personne avait une furieuse odeur de sang... Un sourire amusé s'étira sur les fines lèvres de la femme. Interessant. Descendant jusqu'à sa hauteur, elle resta d'abord à une distance respectable, d'où elle se fit rapidement repérée, au vu du sourire qu'abordait l'inconnue.

Après tout... D'une démarche légère et féline, Elisabeth s'approcha d'elle, jusqu'à se montrer sous la lumière de cette si belle lune.

Bonsoir... murmura-t-elle d'une voix suave.

Neige fit plonger l'inconnue dans son immense regard aussi bleu et profond que les abîmes de l'océan, sans cesser de sourire. Une brise de vent souleva ses cheveux d'un noir d'encre coupés de frais. Elle répondit, doucement, elle aussi :

"Bonsoir."

Neige se doutait que l'inconnue n'était pas là pour discuter de la pluie et du beau temps, mais peu importait à la Narkombre. Elle en avait vu des tas, des criminels, d'ailleurs, elle-même pouvait se considérer comme tel. Mais, contrairement à certains, elle ne fit pas l'erreur de se fier à l'apparence de quelqu'un. Et elle ne sous-estimait jamais personne. Elle continua, d'un voix tout à fait égale :

"Excellent moment pour se promener, vous ne trouvez pas ?"

Elle détourna les yeux pour re-regarder la lune. Quand elle avait plongé ses yeux dans l'âme de cette femme, son pouvoir lui avait soufflé : Zuïa. Mais celle-ci était différente de ceux qu'elle avait "rencontré" jusqu'à présent.
Elle ne fit aucun mouvement qui ne laissait trahir qu'elle se méfiait et qu'elle était sur ses gardes, parce qu'après tout... c'était devenue quelque chose de Naturel chez Neige.

A l'entente des mots de l'inconnue, un petit sourire apparut aux coins des lèvres d'Elisabeth. Oui, ç'était vraiment un excellent moment pour se promener. Personellement, elle préférait trouver un bel endroit où s'assoir pour en profiter. Mais marcher n'était pas une si vilaine façon de le faire...

Si, bien sûr que je le trouve... répondit-elle comme d'une évidence.

Ses paroles suivis d'un silence respectueux, elle détailla la jeune personne devant elle. Le bleu de ses yeux était d'une couleur étonnante, et ses longs cheveux étaient d'une jolie couleur noire. Une subite envie de mieux se "faire connaître" prit la femme, qui se fit un plaisir de couper court à ce silence...

Oh ! Mais quelle malpolie fais-je ! s'exclama-t-elle. Je ne me suis pas présentée...

Un large sourire dévoila ses dents blanches, sourire qui lui donnait un air étrange et inquiétant.

Appelez-moi Mina. Assassin de fonction, mais je ne pense pas être la seule en ces lieux, murmura-t-elle d'une voix lourde en sous-entendus.

L'étrange athmosphère qui ressortait de son interlocutueur, ainsi que quelques tâches rouges sur ses mains, n'avait pas échappé au Judicateur. D'ailleurs, les tâches n'auraient échappé à personne...

Je dois vous faire une confidence, déclara-t-elle, la mine devenue sombre. Je...

Elle se pencha vers l'inconnue, la fixant de ses prunelles vertes claires.

Je ne m'apelle pas Mina. Je m'appelle...

Laissant un petit silence s'installer, la (fausse) demoiselle réfléchit quelques instants, prenant plaisir à laisser traîner un vague suspence.

Je m'appelle Julia.

Satisfaite de ce prénom, elle sourit tout en reprenant enfin des distances correctes envers l'inconnue. Mais son sourire disparut aussitôt.

En fait, non. Je suis plutôt, mh.. Anako. Ou non, Marie. Non, non pas Marie ! Appelez-moi Carolle. C'est joli Carolle, non ?

Eclatant d'un rire sardonique, elle se plut à cette idée. Carolle. Enfin calmée, elle murmura, le plus sérieusement du monde:

Oui, je m'apelle Carolle. J'aime bien ce nom. Et vous ? L'aimez-vous ? Non, ne le dites pas... Je sais que vous l'aimez. Tout le monde aime Carolle.

Sur ces mots, elle pencha légérement la tête, en croisant ses mains derrière son dos, comme une petite fille. Oui, elle aimait bien le prénom Carolle. Illustrant sa pensée, elle lança un petit sourire enfantin à son interlocutrice.

Neige se contenta de hausser un sourcil suite à l'énumération des prénoms. Elle doutait fort qu'elle s'appelait Carolle, mais tant pis.

"Non, en effet, vous n'êtes pas la seule étant donné que la quasi totalité de mes semblables le sont."

Neige l'avait bien évidemment fait exprès... Zuïa ou Narkombre ? Pas tellement difficile a deviner étant donné son physique... cheveux nois, peau trop claire, yeux bleus. Ces yeux qui donait l'impression que la Narkombre pouvait voir l'âme même des gens. Ce qui n'était pas si loin de la vérité, après tout. Elle sourit, elle avait croisé le regard de la fille plus tôt, elle savait donc pertinnamment le vrai non de cette femme.

"Carolle... oui c'est joli. Mais votre vrai prénom doit être joli, aussi."

Neige sortit un mouchoir de ses vêtements, l'humidifia légèrement avec l'eau qui lui restait dans une bouteille d'eau avant de ses nettoyer soigneusement les mains, sans un regard à Elizabeth, sans pour autant relacher sa vigilance. Elle finit par le ranger. Comme le silence s'éternisait, Neige n'étant plus aussi sociale qu'avant, elle se rappela que son interlocutrice s'était présentée. Mais comme ce n'était pas la vérité, elle lui donna donc un de ses nombreux faux nom, avec un léger sourire :

"Je me nomme Kali. Enchantée."

Une meurtrière de fonction, qui l'est comme sa race. Une Narkombre, donc. Elle ne pouvait être Zuïa, sinon elles se seraient reconnues réciproquement. L'une parce qu'elle connaissait la totalité des Zuïa, l'autre parce que la totalité des Zuïa la connaissaient... La Narkombre, pas dupe pour un sou, ne crut pas à son prénom. Allons, avait-elle parut aussi déjantée que ça ? L'esquisse d'un sourire balaya les lèvres fines du Judicateur. Probablement pas assez, puisque son interlocutrice était toujours là. Nullement gênée du numéro absurde auquel elle s'était livrée quelques instants auparavant, elle haussa les épaules en répondant:

Mon prénom ? Oh, c'est une question de point de vue.

Elisabeth. Ca faisait tellement longtemps qu'elle portait ce nom... A force, on s'en lasse. Et arrive le moment ou l'on prend un certain plaisir à s'en trouver par soi-même. Après tout, pourquoi serait-ce aux parents le choisir ? De toutes façons, les siens étaient morts.. ils ne risquent pas de lui en vouloir.

Je préfére Carolle. Ca sonne si joli...

Silence installé, elle observa l'inconnue se rincer les mains. La jeune femme était certes sur ses gardes, mais cherchait peu à cacher sa méfiance, tandis qu'Elisabeth ne manifestait aucun doute vis à vis de la Narkombre. Tant qu'il n'y a pas de provocation, les chances de combat étaient (quel dommage!) minimes. A moins que son interlocturice soit un tantinet lunatique et versatile... mais la malsaine d'esprit, ici, ç'était elle. Enfin, la demoiselle prit à nouveau la parole. Elle se présenta comme une certaine Kali.

Kali ? Mmh..

La Zuïa fit une petite moue.

Je n'aime pas ce nom. Ca sonne brute.

"Quelle dommage... vous préférez peut-être Leone ? Ou peut-être Leyla... quoique, Leyla est sensée être morte il y a deux jours."

Neige faisait preuve d'un calme aberrant pour une personne qui n'aimait pas les Zuïas. Mais quelque chose lui disait que "Carolle" n'était pas comme ses semblables. Ça pourrait être fort interessant de s'opposer à elle... juste por voir.
Elle pensa ensuite à comment aurait réagit Ruby... Neige était certaine que son associée aurait soi tourné les talons tranquillement sans rien dire, ou aurait attaqué la Zuïa sans sommation.

**Je suis pas du genre à prevenir non plus, après tout...**

[ Désolée, comme le ton de ta réponse n'était pas précisé, je me suis permise de l'interpréter moi-même. ]

Un petit sourire, éclairant son visage exsangue, remplaça la moue enfantine qu'avait adopté la femme un peu plus tôt. Elle n'avait même pas cherché à savoir si le prénom que lui avait donné "Kali" était vrai, que l'inconnue vendait déjà la mèche. La rapide répartie dont elle faisait preuve marquait un changement. Le ton illustrait un calme forçé, qui tentait de cacher une brutalité ou un mépris évident. L'agacement était peu caché. Le fait de citer une personne censée être morte voilait à peine une certaine menace. Les choses devenaient-elle intéressantes...? Le Judicateur hésita un instant à l'attitude à adopter, mais abandonna vite. Réfléchir à une si plaisante situation serait gâcher cet instant d'échange (presque) spontané.

Confidence pour confidence, répondit-elle d'une voix amusée, je préfère Leone. J'aime beaucoup. Original, simple, élégant.

Quittant son interlocutrice des yeux, elle leva le regard vers la lune, qui n'avait pas perdu une once de sa beauté depuis ces quelques instants. Il n'y avait pas à dire, l'astre était superbe...

Qu'est-il arrivé à Leyla ? demanda-t-elle, s'arrachant rapidement de sa contemplation pour regarder le visage de "Kali"

"Eh bien... ce sera Leone."

Neige sourit, un peu comme l'aurait fait un gamine a qui on venait de proposer des bonbons. Elle plaça ensuite son index devant ses lèvres, fit un clin d'oeil espiègle à celle qu'elle savait pertinnament qu'elle était une Zuïa :

"Leyla a eu un accident... alors qu'elle donnait quelques informations sur un batiment pas loin du cimetière a un Zuïa... Un type ivre est passé et l'a tuée avant de se faire assassiner par le Zuïa... Quelle perte, non ?"

Bien évidemment, elle avait omis de préciser qu'elle avait croisé le regard de l'homme ivre pour lui implanter l'idée d'aller tuer Leyla... Charmant, n'est-ce pas ? Mais après tout, pourquoi l'aurait-elle énoncé tout haut. C'était quelque chose dont Neige voulait que "Carolle" devine elle-même ou bien, au minimum, qu'elle s'en doute un peu.

Leyla aurait été donc une informatrice, une informatrice de Zuïa, de surcroît. Leyla. Cherchant en vain dans sa mémoire, elle n’y trouva aucune donnée sur une certaine « Leyla », qui remplirait une telle fonction. Par conclusion, soit l’information n’était que bénigne et on avait donc jugé inutile de la prévenir, soit la filtration d’informations n’avait été qu’un prétexte pour un rendez-vous interdit. Concrètement pour le Zuïa en question, il vaudrait mieux que ce soit la première solution. Dans le cas contraire, Elisabeth se fera un plaisir de le retrouver, afin de lui infliger la punition qu’il se doit. S’il se rabaissait à avoir fréquenter une femme ou demoiselle dans le secret, c’est que la relation en elle-même était gênante pour l’un des deux. Qui dit gêne, dit faute honteuse. Et cette faute honteuse, si elle avait réellement eut lieu, en plus de la découvrir, le Judicateur aura un nouveau jouet, c'est-à-dire le Zuïa fautif… A cette idée, un mauvais sourire vint effleurer ses lèvres.

Se détournant de ces réjouissantes pensées, ses réflexions les menèrent rapidement vers Leone. Quel rôle avait-elle eut là-dedans ? Etant si bien informée, elle avait sans nul doute un lien dans ce meurtre. Utiliser le prénom d’une morte était d’un glauque ! Qui pourrait se permettre d’une telle extravagance ? Fort cette question, son sourire s’agrandit. Vu ainsi, Leone était très probablement en partie responsable de ce crime. Elle ne pouvait être l’ivrogne en question, un regard vers la jeune femme suffisait à dissuader toute supposition qu’elle puisse être dans cette situation si humiliante. Elle n’était évidemment pas le Zuïa. Elle n’avait donc pas de lien direct avec la scène. La seule façon d’avoir été actrice de ce meurtre aurait donc été de convaincre, ou du moins guider, l’homme soûl vers la victime. Se posait donc une nouvelle question. Comment avait-elle fait ? Par pression ? Chantage ? Intimidation ? Ou avait-elle usé du pouvoir de ses yeux, dont le Judicateur ignorait tout ? A ce niveau-là, seule Lus-An savait. Quoiqu’il en soit... mauvais sourire vint effleurer ses lèvres.

" Quelle force de persuasion, murmura Elisabeth, une pointe d’amusement dans la voix. "

[ Ok, j'ai l'impression d'écrire de la... Pas d'inspi et crevée, désolée ! ]

Neige ne réagit pas. A quoi bon. Carolle saurait bien assez tôt de quoi il retournait si elle tentait quoi que ce soit. Mais quelque chose hurlait à Neige que ce ne serait pas si simple et que cette fille n'était pas n'importe qui. C'en devenait tellement attrayant pour la Narkombre.
Elle se contenta de sourire. Un sourire énigmatique et plein de promesse plus dangereuses les unes que les autres en cas de mauvaise action de son interlocutrice.

"Dites-moi... vous êtes venue ici pour faire quelque chose en particulier ?"

La curiosité reprenait le pas sur elle. C'était son côté "espionnage" qui ressortait mais en pas discret du tout. Et de toute manière, elle se doutait qu'il valait autant être franche quand il n'y avait rien à cacher d'important.

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